Aujourd'hui, après avoir explorer l'histoire médiévale et la Renaissance au château de Chenonceau, je vous propose de reprendre notre périple jusqu'à nos jours...
Pour une raison inconnue, les agrandissements prévus pour le château de Chenonceau sur la rive gauche du Cher sont interrompus. Le chantier continue sur la rive droite, par l'élévation du bâtiment des Dômes et la Chancellerie de 1580 à 1585.
Le 5 janvier 1589, Catherine de Médicis meurt au Château de Blois et le 1er août suivant, le roi Henri III est assassiné à Saint-Cloud, par le moine Jacques Clément. Henri de Navarre devient roi de France sous le nom d'Henri IV.
Louise de Lorraine reçoit Chenonceau en héritage à la mort de son époux, le roi Henri III. Elle ne se remet pas de la disparition brutale de son mari assassiné en 1589 et fait de Chenonceau, un lieu de recueillement. Louise de Lorraine revêt la couleur du deuil royal et devient la « Dame blanche de Chenonceau ».
Louise de Lorraine disparaît le 29 janvier 1601 et Chenonceau devient la propriété de César de Vendôme (fils d’Henri IV et de Gabrielle d’Estrée) et son épouse, Françoise de Lorraine (nièce de Louise).
Le 9 juin 1733 Claude Dupin, riche fermier général, achète le château au duc de Bourbon (héritier de César de Vandôme) pour 130 000 livres.
Sa seconde femme, Louise-Marie-Madeleine Fontaine tien un salon très renommé à Chenonceau et reçoit notmamment Voltaire, Fontenelle, Marivaux, Montesquieu, Buffon et Rousseau.
C'est à Louise Dupin que l'on attribue la différence d'orthographe entre le nom de la ville (Chenonceaux) et celui du château (Chenonceau), bien qu'aucune pièce d'archive ne confirme ce fait.
Pendant la Révolution française, Mme Dupin s'installe définitivement à Chenonceau. Grande amie des villageois, Louise Dupin sauve la chapelle du château en permettant qu'elle soit transformée en resserre à bois.
Quant à Mme Dupin, elle consent à laisser détruire plusieurs dizaines de portraits royaux et seigneuriaux du château… mais réussit à préserver ses bijoux. François Lecomte soustrait de la fureur révolutionnaire, les plus importantes archives de Chenonceau en les mettant sous la protection des scellés de la commune. Son action est tout aussi déterminante lorsque le château est menacé de démolition. Il serait parvenu à sauver Chenonceau par un trait d'esprit : « Eh quoi citoyens ! ne savez-vous pas que Chenonceau est un pont ? Vous n'avez qu'un seul pont entre Montrichard et Bléré et vous parlez de le démolir ! Vous êtes les ennemis du bien public ! ».
Mais un nouveau danger guette le château par la mise sous séquestre comme bien domanial. Les révolutionnaires prétendent que s'agissant d'une ancienne propriété royale, l'ensemble du patrimoine de Mme Dupin doit revenir à la Nation, selon le décret du 10 frimaire An II (30 novembre 1794). En 1795, les commissaires de la République se présentent et en ordonnent la saisie, à laquelle Mme Dupin s'oppose. Elle obtient de présenter sa défense juridique par un mémoire prouvant sa qualité de bien privé en exposant la teneur de tous les titres conservés dans le chartrier du château, datés d'avant le 1er février 1566 au 9 juin 1733, date d'achat par son époux. Ce texte reconnu valide, Mme Dupin n'est plus inquiétée dans la possession de Chenonceau, mais elle est soumise à l'emprunt forcé en 1796 et 1798.
Le 30 brumaire An VIII (20 novembre 1799), Mme Dupin s'éteint à l'âge de quatre-vingt-treize ans et fut inhumée dans le bois qui s'étend sur la rive gauche du Cher, dans l'axe de la galerie.
En 1799, son petit-neveu René, François de Villeneuve, hérite du château et le domaine restera dans sa famille pendant soixante-cinq ans.
René de Villeneuve fait effectuer des réparations pour effacer les dégâts dûs à la Révolution.
Sous Napoléon III, René de Villeneuve devient sénateur et chambellan honoraire. En 1859, les archives du château que l'abbé Lecomte avait sauvées, sont retrouvées dans un parfait état de conservation. René de Villeneuve fait appel à l'abbé Casimir Chevalier, archéologue et historien, qui inventorie, classe et publie les archives de Chenonceau. Ces références documentaires irremplaçables serviront de base pour les grands travaux à venir.
Les Villeneuve reçoivent la visite de leur cousine George Sand en 1840 et en décembre 1845, celle de Gustave Flaubert.
René de Villeneuve meurt le 12 février 1863. Le château revient à ses deux enfants, la marquise douairière de La Roche-Aymon (1796-1866) et à Septime de Villeneuve (1799-1875). Les héritiers du comte de Villeneuve ne conservent pas cette fort dispendieuse demeure en entretien et réparations. Le domaine est donc mis en vente au mois d'avril 1864.
En 1864, l'architecte Félix Roguet est chargé par Mme Marguerite Pelouze de remettre à neuf le château de Chenonceau.
En avril 1864, la famille de Villeneuve cède le château, les trois parcs, un moulin, des dépendances et 136 hectares de terres pour850 000 francs à Marguerite Wilson. Elle entreprend de 1865 à 1878, la « restauration » du château et de son domaine, pour une somme estimée à plus d'un million et demi de francs-or. La nouvelle propriétaire fait appel à l'architecte Félix Roguet, originaire de Dijon, disciple de Viollet-le-Duc, pour diriger le pharaonique projet.
Au cours de l'été 1879, Mme Pelouze reçoit dans son orchestre de chambre, le jeune pianiste Claude Debussy.
La restauration de Chenonceau et le coût de son train de vie, obligent Mme Pelouze à recourir aux emprunts pour payer ses dettes exorbitantes, tant et si bien qu'elle ne peut plus rembourser ses créditeurs. Le domaine de Chenonceau est hypothéqué en 1888, puis saisi à la demande des créanciers dont le principal plaignant, est le Crédit foncier. Le samedi 5 janvier 1889, a lieu à la barre du tribunal civil de Tours, la vente du château de Chenonceau. Le domaine est adjugé au Crédit foncier pour une somme de 410 000 francs. Quant à Madame Pelouze, elle va résider en fin de vie à Loches, où elle décède le 16 octobre 1928, à l'âge de 92 ans.
Le domaine acheté par le Crédit foncier en 1889 est revendu en 1891 avec une confortable plus-value, pour la somme de 1 000 000 francs à M. José Émilio Terry, député de La Havane. Propriétaire de Chenonceau pendant cinq ans, José Émilio Terry cède le château à son frère Francisco Xavier Terry, le 10 avril 1896 pour 1 080 000 francs.
Nathalie Terry, fille de francisco, comtesse de Castellane, conserve Chenonceau jusqu'au 5 avril 1913, date à laquelle la propriété est mise en vente aux enchères publiques pour 1 300 000 francs à l'audience des Criées. Trois compétiteurs sont en lice : l'industriel Henri Menier, le fabricant de cycles Clément et l'antiquaire Guérault.
Cette vente judiciaire par adjudication fait entrer le domaine de Chenonceau pour 1 361 660 francs, dans le patrimoine d'Henri Menier, homme de la grande bourgeoisie industrielle. Henri Menier, issu de la famille des chocolatiers Menier.
Une crue historique du Cher le 7 mai 1940, dévaste le jardin de Diane. Aux ravages de la nature, viennent s'ajouter ceux des hommes. Le 20 juin 1940, les allemands se positionnent au nord de la vallée du Cher. Alors que l'armée française n'est plus stationnée sur la région, les allemands installent une batterie d'artillerie de 105 mm et tirent sur le parc de Chisseau. Un obus traverse la toiture des galeries, un autre éclate sur l'escalier extérieur de la tour des Marques et plusieurs atteignent les champs aux alentours. Un avion vient en appui des opérations terrestres et pilonne les douves du parc. Les allemands traversent la rivière, occupent plusieurs mois Chenonceau et décident son évacuation. Mais les autorités allemandes interdisent l'accès de la propriété, excepté pour le régisseur, du fait que l'édifice se trouve sur la ligne de démarcation avec un côté en zone occupée et l'autre en zone libre. Les destructions sont réparées en 1943 et la frontière des deux zones est supprimée. Le 7 juillet 1944, un avion américain bombarde le château. Les bombes tombent dans le Cher, dont une à proximité de la chapelle et détruit les vitraux d'origine.
À partir de 2002, Laure Menier, actuelle propriétaire, gère seule la conservation et la gestion du domaine de Chenonceau.
En 2009, Laure Menier lance un vaste programme de restauration du château : les façades du logis de Thomas Bohier et l'extérieur de la galerie sont refaites ainsi que la toiture et la charpente en chêne. Le campanile de l'édifice est démonté, restauré en atelier et remis en place. Des frises en pierre sont réalisées à l'identique. Sans compter la remise en état de la maçonnerie, des vitraux, ferronnerie et peinture. Les travaux s'achèvent au mois de mars 2012.